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Gaspart de la nuit "Un rêve" (de Aloysius Bertrand)

Gaspart de la nuit : "Un rêve"

Ce texte est le récit d’un rêve, comme son nom l’indique. Il évoque trois visions simultanées du rêveur. Le premier paragraphe présente ces trois visions. Il a été le témoin direct de ses visions, il les restitue telles quelles. On a le sentiment d'incohérence. Il insiste sur sa bonne foià présence du « je ». Le principe unificateur va être le narrateur, car il est à la fois témoin et acteur. Une atmosphère lugubre se dégage de toutes ces visions. C'est le romantisme noir.

I / L'aspect du texte

Ce texte est structuré par des paragraphes, que l’on pourrait nommer des couplets ou strophes. Le rythme et la disposition particulière font penser à un poème en prose. Ce texte est structuré par des reprises anaphoriques, telles que « ainsi j’ai vu », ou « ainsi je raconte ». Ce sont des incises dans les tirets. Elles produisent un effet de réalisme, insistant sur le témoignage direct du narrateur. Le vocabulaire employé évoque des reptiles : "murailles lézardées", "tortueux", "grouillant". Il y a des allitérations en "r"à"furent d'abord", "raconte", "muraille". Ces allitérations renforcent la structure des strophes, cela rend plus cohérent. Il y a des phrases nominales (sans verbes). Le narrateur perçoit des sons avec des allitérations en "f" et en "l". Un dialogue entre les différents sons dans chaque scène est suggéré par la répétition de mots ou par antithèse : "cris plaintifs et rires féroces". Du 1er au 2ème paragraphe, de l'abbaye à la cellule, de la forêt aux branches, les phrases deviennent plus complexes puisque des verbes apparaissent, il y a de plus en plus de détails, c'est une évolution syntaxique du texte, on passe des phrases nominales aux phrases complexes. Il y a des connecteurs logiques : "d'abord", "ensuite", "enfin".

II / Les différents cadres spatiaux (étude des 2 premières strophes):

Dans le premier paragraphe, l’auteur nous indique les cadres spatiaux présents dans son rêve ; ils sont au nombre de trois : l’abbaye, la forêt, et le Morimont à Dijon. La lune a une action maléfique, car elle lézarde les murailles de l’abbaye. La forêt est représentée comme un labyrinthe. Le Morimont grouille d’une activité désagréable, il peut être traduit par le mont de la mort. L’abbaye s’oppose à la forêt. L’abbaye est un lieu sacré, chrétien, dont le principal personnage caractéristique est Dieu, et la forêt est un lieu sauvage, païen (avec le chêne), caractérisé par le diable. Dans le deuxième paragraphe, on a une vision plus rapprochée des cadres spatiaux, caractérisée par des notations auditives. L’auteur entend le glas et les sanglots venant de l’abbaye, les cris plaintifs et les rires féroces de la forêt, ainsi que les prières des pénitents noirs. Les "rires féroces" ont un caractère satirique.

III / Les personnages     

A partir du troisième paragraphe, le narrateur nous donne des indications, sur les personnages présents dans son rêve. Il nous informe de la situation critique dans laquelle chacun se trouve. Il y a un moine à l'agonie, une jeune fille pendue et le bourreau avec le narrateur, qui s’avère être auteur et acteur àintrusion du narrateur (ligne 11). Le rêveur et le condamné sont le même personnage. On se demande d’ailleurs quel crime il a commis. On a une identification des deux autres personnages au quatrième paragraphe, avec une description symétrique du moine et de la jeune fille : on apprend d’abord leur nom (Dom Augustin et Marguerite), puis le narrateur évoque la mort de chacun, ensuite il nous décrit les vêtements qu’ils portent (habit de cordelier et robe blanche d'innocence), et enfin, il nous indique le motif du feu (chapelle ardente pour le prieur défunt et des cierges pour la jeune fille). Au cinquième paragraphe, le « mais moi » provoque un effet de rupture : une rupture syntaxique (par l'utilisation de la conjonction de coordination "mais"). On a une seconde rupture (du point de vue du vocabulaire cette fois-ci), avec la « barre du bourreau » qui va être brisée. Le « mais moi » est une distorsion maligne de ce qui s’est passé. Le criminel échappe à la mort. Il y a un renversement de tout ce qui a précédé. Le condamné échappe à la mort. L'eau va remplacer le feu. On assiste à un débordement de violence puis la tension s'apaise et il continue de rêver tranquillement. Le criminel de Morimont est-il le meurtrier de Marguerite ? Ce rêve pourrait être la réalisation d’un fantasme meurtrier. Marguerite évoque la pureté. Le meurtrier de Marguerite aurait commis un crime contre Dieu, contre l'innocence.

Conclu : La dualité, chère à l’auteur, se retrouve dans le texte, car on a une opposition entre le domaine chrétien et le domaine satanique. Le poème va croître jusqu’à un point d’intensité, qui coïncide avec la fin du rêve. Divers personnages représentent les différentes personnalités de l’auteur. On retrouve les fantaisies du philosophe Rembrandt, et de Jacques Callot. Aloysius s’est inspiré de l’atmosphère médiévale qui règne à Dijon à cette époque. Il a d’ailleurs inspiré Mademoiselle l’Héritier (« les enchantements de l’éloquence »). Gaspard est le nom de l’un des rois mages. Il symbolise le côté apaisant de la nuit. Ce texte appartient à l'étrange (car on sait qu'il a rêvé, il y a une explication).